Présentation de Libres penseurs athées

David Rand, président

2018-06-05


Libres penseurs athées (LPA) est une association athée domicilée à Montréal, Québec, Canada, fondée en 2011. Nous utilisons et le français et l’anglais ; le titre complet de l’association est donc Libres penseurs athées — Atheist Freethinkers (LPA-AFT) et nous maintenons deux principaux sites web : www.atheologie.ca (en français) et www.atheology.ca (en anglais).


Athéisme et antithéisme

En tant qu’athées, nous considérons que toutes les croyances surnaturelles — pas seulement la croyance en dieu(x) — sont infondées et potentiellement nuisibles. Notre Manifeste athée développe notre point de vue en détail. Le paragraphe suivant est un bref résumé de ce Manifeste :

Nous sommes athées. À la lumière de la pensée critique et de la science, les dieux, les démons, la réincarnation, l’âme immortelle et les autres croyances surnaturelles s’avèrent des fictions infantilisantes. Nous valorisons la raison, le savoir et l’avancement matériel, intellectuel et moral de l’humanité. Notre philosophie est matérialiste : il n’existe aucune âme associée au corps, tandis que l’esprit ou l’intellect est lui aussi matériel car relevant d’un processus neuronal. Nous sommes des êtres moraux et en constante évolution, responsables de nous-mêmes, à l’instar de l’humanité dont nous faisons partie. Nous préconisons la laïcité et rejetons toute influence religieuse dans les institutions publiques.

Puisque nous reconnaissons la nature nuisible des croyances en dieu(x) et des croyances infondées semblables, nous sommes antithéistes. Cette prise de position est tout à fait compatible avec notre appui pour la laïcité. Une séparation nette entre la religion et l’État, afin que les institutions civiles soient exemptes de toute ingérence par des institutions et des pratiques religieuses, est nécessaire afin de protéger la liberté de conscience de l’ensemble des citoyens et des citoyennes.


Laïcité

Notre approche à la laïcité se base sur la tradition moderne républicaine, celle que l’on appelle parfois laïcité républicaine ou, encore mieux, laïcité tout court, sans adjectif. Remarquons que cette approche se distingue de celle indiquée par le mot anglais secularism qui n’est pas tout à fait synonyme de laïcité. Bien que le résultat de luttes contre l’obscurantisme et la puissance étouffante de l’Église catholique en France, et des luttes semblables au Québec, le concept de laïcité est universaliste et transcende les circonstances d’un pays particulier.

Contrairement à la laïcité de type républicain, la tradition de secularism dans le monde anglophone est plutôt faible car elle s’inspire surtout de l’approche proposée par John Locke dans son essai de 1689, intitulé A Letter Concerning Toleration (Lettre sur la tolérance). Locke propose une société et un gouvernement qui tolèrent toutes les religions, y compris « les presbytériens, les indépendants, les anabaptistes, les arminiens, les quakers », et, au fait « ni le païen, ni le musulman, ni le juif ne doivent être exclus des droits civils de la communautés à cause de sa religion. » Toutefois, Locke exclut les religions qui ne tolèrent pas les autres, ce qui a pour effet d’exclure les catholiques puisque l’on s’attend à ce que ces derniers vouent allégeance à un prince étranger.

Locke est aussi résolument athéophobe, déclarant qu’« il ne faut pas du tout tolérer ceux qui nient l’existence d’un Dieu. » Au fait, ce que propose Locke ne peut même pas s’appeler sécularisme — au contraire, il serait plus juste de l’appeler pseudo-sécularisme —car Locke suppose que tout individu ayant un minimum d’éthique, ayant quelque droit que ce soit de vivre en société avec les autres, doit forcément avoir une religion, et, de surcroît, une religion théiste. La vision de Locke n’est qu’une forme limitée de neutralité religieuse, c’est-à-dire, une neutralité entre les différentes religions concurrentes, sans laisser de place aux incroyants et sans séparation entre religion et État.

Il existe un fort parallèle entre le pseudo-sécularisme lockéen et le multiculturalisme canadien. Bien que le terme multiculturalisme s’emploie souvent dans le sens de la diversité culturelle, dans la pratique il revient à du relativisme culturel, du communautarisme et du multiconfessionalisme proposé par Locke, où l’on accorde à l’appartenance religieuse de l’individu une priorité sur les autres aspects de son identité, en particulier même sur la citoyenneté, et l’athéisme est au mieux invisible. Ainsi, nous chez LPA-AFT nous opposons à cette idéologie car elle est incompatible avec l’ethos universaliste de la laïcité.

La laïcité authentique dépasse de loin la simple neutralité entre les différentes religions. Pour la laïcité, il faudrait la neutralité entre la religion et l’irréligion, afin que les droits des croyants et des athées soient sur un pied d’égalité, protégeant la liberté de conscience (qui englobe à la fois la liberté de religion et la liberté de s’affranchir de la religion) de tout le monde. La laïcité de type républicain, qui implique une claire et nette séparation entre la religion et l’État, répond à ce critère, tandis que la tradition lockéenne en est loin. Même dans la tradition républicaine il reste quelques traces d’athéophobie, la mentalité qui consiste à voir dans l’athéisme franc et ouvert une espèce de menace pour la liberté, mais ce préjugé est bien pire dans l’approche lockéenne qui accorde à la liberté de religion préséance sur la liberté de s’affranchir de la religion, discriminant ainsi les incroyants. (Pour de plus amples informations, consultez Secularism: Lockean and Republican.)


La législation récente au Québec

Nous, chez LPA-AFT, appuyons la prohibition de tout signe religieux dans les institutions de l’État, y compris les signes portés par les fonctionnaires en service. Nous considérons qu’il est particulièrement important de bannir les couvre-visage, qu’ils soient portés par les fonctionnaires ou par les usagers des services publics. Le voile intégral islamique (le niqab et la burqa) constitue un exemple extrême de signe religieux et représente un outil de propagande utilisé par l’islam politique afin de promouvoir son idéologie d’extrême droite. Mais tout couvre-visage est inacceptable dans un contexte de fournir ou de recevoir des services publics, car cela constitue une entrave à la communication, à l’identification et à la sécurité.

LPA-AFT a appuyé la Charte de la laïcité proposée en 2013-2014 par le gouvernement québécois de l’époque. Cette Charte aurait constitué une avancée majeure vers un Québec officiellement laïque et la portée de ses dispositions allait bien au délà de la question des signes religieux, bien qu’elle ait manqué de s’attaquer aux privilèges fiscaux dont jouissent les institutions religieuses. Nous nous sommes opposés au projet de loi 62, adoptée en 2017, car cette loi est bien trop faible ; c’est-à-dire que sa prohibition des couvre-visage est très affaiblie par des exceptions et des accommodements. Dans les deux cas, des représentants de LPA-AFT se sont présentés devant un comité parlementaire à l’Assemblée nationale, à Québec, afin de présenter notre point de vue. Pendant le débat autour de la Charte, notre association s’est jointe au Rassemblement pour la laïcité (RPL) dont le but était d’appuyer cette Charte, et nous continuons à participer à cette coalition.

Notre appui pour la laïcité de type républicain est controversé dans le contexte canadien. On aurait espéré que, dans ce pays, où le français et l’anglais constituent deux langues et deux cultures fondatrices, les athées et les sécularistes se seraient penchés sur les deux traditions, la lockéenne et la républicaine, afin de les évaluer objectivement, et seraient arrivés à la conclusion évidente que le type républicain est de loin supérieur. Mais la plupart hors-Québec, ou du moins ceux qui font le plus de bruit, ne l’ont pas fait. Beaucoup demeurent obstinément attachés à la vieille tradition lockéenne, dont on fait la promotion en galvaudant diverses expressions vagues comme « la diverité », « l’inclusivité » ou « la laïcité ouverte ». Cette fermeture d’esprit est une expression de l’ethnocentrisme anglophone et dément leur prétention d’être ouverts à d’autres cultures.


Ce qu’il faut changer

En tant qu’athées et partisans de la laïcité, nous appuyons bien sûr l’abrogation de la loi canadienne contre le blasphème, soit l’article 296 du Code criminel, et nous prônons la suppression de la référence à la « suprématie de Dieu » du préambule de la Constitution de 1982. Mais nous proposons aussi les mesures suivantes (cette liste n’est pas exhaustive) :

  • Abrogation de l’exception religieuse dans la législation canadienne contre la Propagande haineuse (à l’article 319 du Code criminel). LPA-AFT a lancé une pétition à cet effet sur le site du parlement canadien.
  • Interdiction de tout accommodement religieux dans les services publics. Seuls les accommodements justifiés par des critères réels et objectifs — comme par exemple l’handicap physique ou des considérations d’hygiène ou de santé — doivent être permis. En particulier, l’accommodement religieux accordé par la GRC aux adhérents de la religion sikhe doit être annulé.
  • Abrogation de la Loi sur le multiculturalisme Canadien. Si elle n’est pas abrogée, il faut au moins l’amender afin d’éviter tout accommodement religieux. De plus, l’alinéa 17(1)b) du Règlement sur la citoyenneté (qui concède des privilèges à la religion lors des cérémonies) doit être abrogé. Les deux ont bien servi Zunera Ishaq devant les tribunaux dans ses effort pour permettre les couvre-visage lors des cérémonies de citoyenneté.
  • Abrogation des crédits d’impôt pour les dons faits aux organismes religieux et de tout autre avantage fiscal accordé à ces organismes.
  • Retrait par la Chambre des communes de la Motion M-103 qui a condamné la soi-disant « islamophobie ». Une résolution semblable adoptée par l’Assemblée nationale du Québec doit aussi être répudiée.
  • Retrait du volet « culture religieuse » du programme obligatoire Éthique et culture religieuse (ECR) dans les écoles publiques québécoises, puisque ce programme fait la promotion de la croyance religieuse auprès des enfants en présentant la religion sous un aspect aseptisé, sans esprit critique, et parce qu’il associe la morale à la religion, véhiculant ainsi l’athéophobie.

Joignez-vous à nous !

Si vous habitez le Canada (ou même dans le cas contraire) et que vous vous reconnaissez dans notre approche, nous vous demandons de penser à adhérer à notre association ou à nous faire un don. Les deux peuvent se faire en ligne sur la page Adhésion et dons de notre site web. De plus, si vous habitez ou visitez la région montréalaise, vous pourriez, si cela vous intéresse, assister à l’une de nos rencontres amicales mensuelles qui sont ouvertes à tous et à toutes, que vous soyez membres ou non le LPA-AFT.


2 commentaires sur “Présentation de Libres penseurs athées
  1. Jacques LACOTE dit :

    Bonjour ! Et merci pour votre envoi et votre action.
    Une question me revient sans cesse, à la vue de comportements religieux divers : comment convaincre calmement nos concitoyens que ces croyances en différents dieux sont historiquement néfastes à l’émancipation humaine et continuent de l’être de plus en plus pour des motifs de conditionnement des masses ?
    La frange charité n’est pas suffisante pour couvrir toutes les exactions commises au nom d’un dieu ! Il faudrait que tous les élus soient incités à se réapproprier la responsabilité de l’aide aux plus faibles et cessent de s’en décharger sur les ONG et autres associations caritatives !
    Ce qui les occuperait plus sainement que leurs querelles stériles !
    Si les humains avaient autant cru en eux-mêmes et agi pour eux-mêmes qu’ils ont gaspillé d’énergie à honorer sans cesse des dieux imaginaires, la face de l’humanité en eut été totalement changée.
    J’ai lu que l’origine des croyances remonterait à l’époque préhistorique et suivantes, tant que les phénomènes naturels (orages, grêle, pluie, tremblements de terre, éruptions volcaniques..) ne pouvaient trouver d’explications scientifiques logiques. Ils étaient attribués à des forces surnaturelles. Cette croyance a été ensuite utilisée par les premiers « politiques » pour asseoir un certain pouvoir sur leurs tribus… Et cet opportunisme intéressé d’une minorité n’a fait qu’empirer, avec tous les abus que l’on connaît sans régler pour cela la question des inégalités les plus criantes.
    En politique comme en religion, il y a ceux qui la servent et ceux qui s’en servent.
    Ayant eu la chance de connaître Montréal… et Laval, j’en garde le souvenir d’un accueil particulièrement chaleureux de la part des autochtones pour les « Frinçais de Frince » !
    Bien amicalement.

  2. Pierre Thibault dit :

    L’idée d’avoir des cimetières laïques serait à ajouter à cette liste.

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