Michel Piquemal, Hugo-Doc, 2014
Recension par Jacques Savard
Les thèmes de Heureux sans Dieu ni Religion ont déjà été développés abondamment dans de nombreux ouvrages et généralement plus en profondeur. Mais ce petit opus de 140 pages fait œuvre d’initiation. Il résume très bien l’ensemble des arguments soutenant l’athéisme, la faiblesse des reproches faits aux athées et montre bien les contradictions fondamentales des croyances religieuses.
Le livre est divisé en quatre parties suivies d’une conclusion. Les deux premières parties sont un heureux compendium des arguments les plus communs répondant aux attaques contre l’athéisme, ou les athées, de même que les principaux arguments désavouant la croyance en Dieu. Comme indiqué précédemment, on n’y trouve pas beaucoup de matériel neuf, mais il s’agit d’un résumé complet et soutenu de quelques références intéressantes.
La troisième partie présente quelques thèmes expliquant la prévalence de la croyance religieuse. Il s’agit d’un survol rapide pouvant sembler superficiel à des spécialistes mais qui offre un intérêt certain. Son argument justifiant l’universalité de la croyance religieuse gravite autour de l’affirmation que l’homme n’est pas un être de raison, un point de vue plus rarement proposé. M. Piquemal ajoutera, parlant de l’homme, que « [c]e n’est pas dans sa nature profonde, plus attirée par l’irrationnel, l’affectif, le sensible, les pulsions et le magique ».[1]
La quatrième partie est la plus originale. On y trouve une présentation d’un Credo athée en réponse au Credo catholique. Chaque croyance énoncée sert de prétexte à un développement intéressant de quelques éléments liés au thème. Il est, cependant, curieux que Michel Piquemal ait choisi la « liberté de religion » comme première croyance de l’athée. D’où vient ce besoin d’apaiser les religieux en les sécurisant contre des athées qui se comporteraient comme des croyants ? Cependant, il y colmate la brèche grâce à un honnête plaidoyer en faveur de la laïcité qui correspond mal au libellé initial. On aurait préféré, comme choix, « la laïcité » tout court, sans insistance particulière sur la liberté de religion. Vient ensuite sa croyance en la spiritualité, identifiée à la vie de l’esprit en général, donc non transcendante. Suivent alors ses croyances dans la « joie de vivre », en l’ « interdépendance avec la nature », en l’ « égalité entre les êtres humains », l’ « égalité entre hommes et femmes », la « morale de vie », le « respect des lois », la « raison », la « diversité des cultures », la « science » et le « droit de disposer de sa vie ». Il s’agit d’une vision personnelle, certes, mais elle demeure une présentation réussie de l’athée comme être moral.
La grande déception reste sa conclusion, empruntée à M. Compte-Sponville, qui suggère aux athées de renoncer à leur droit d’opposer une résistance réelle et effective aux religions, pour motif de tolérance. On y sent un désir de ne pas indisposer les religions et la peur viscérale de la gauche occidentale d’être accusée d’intolérance. Une conclusion incohérente avec la trame du livre qui est essentiellement un plaidoyer contre la pensée magique et ses principaux vecteurs, les religions.
- Heureux sans Dieu ni Religion, Michel Piquemal, Hugo-Doc, 2014, page 78.