Veronica Abbass
2016-03-06 – Dernière modification 2016-03-07
Dans un article du Toronto Star intitulé Ottawa Should Shutter the Office of Religious Freedom (Ottawa devrait supprimer le Bureau de la liberté de religion), Bruce Ryder et Luka Ryder-Bunting mentionnent ce qu’ils appellent l’hypocrisie d’un gouvernement qui prétend vouloir promouvoir la liberté de religion à l’étranger tandis que, en même temps, il minerait, selon eux, cette liberté ici au Canada, en particulier en ce qui concerne le niqab. Pourtant, il est évident que, peu importe l’opinion que les Canadiens puissent avoir de Stephen Harper et de son gouvernement conservateur, la tentative d’interdire le port du niqab durant les cérémonies de citoyenneté canadienne demeure une des meilleures décisions jamais prises par Harper et son gouvernement au cours de leur mandat.
Selon Stephen Harper, le niqab puise ses racines dans une culture anti-femmes (Niqabs ‘rooted in a culture that is anti-women,’ Harper says). On peut en dire autant du hidjab ; toutefois, ce n’est pas tout le monde qui serait d’accord. Le 25 février 2016, un groupe à Ottawa s’appelant City for All Women Initiative (CAWI, L’initiative Une ville pour toutes les femmes) a tenu une « Journée de solidarité avec le hidjab à Ottawa » dans le Salon des conseillers à l’Hôtel de Ville :
À cette occasion, des femmes non musulmanes porteront un hijab (sic) pendant une journée ou une partie de la journée en preuve de leur solidarité envers les femmes musulmanes. Nous nous mettrons dans la peau de nos sœurs.
Bien que l’événement, selon les organisateurs ou organisatrices, aurait comme buts de « mieux sensibiliser le monde à la question du hidjab, mieux comprendre sa signification et en faire un symbole de paix », ils ou elles ont miné ces buts en déclarant que cette « Journée de solidarité avec le hidjab » servirait à contrer « l’islamophobie » comme si la peur d’une religion qui opprime et discrimine les femmes serait irrationnelle.
Le mot islamophobie est un terme odieux et émotif utilisé dans le but de faire taire les critiques du hidjab, du niqab et de l’islam, une religion qui, selon certaines interprétations, impose aux femmes l’obligation de se couvrir les cheveux et le corps. Il est alors regrettable que le Bureau des droits de la personne de l’Université d’Ottawa ait fait la promotion de cette Journée de solidarité avec le hidjab tout en s’appuyant sur « la charte des droits et libertés du Canada ainsi que dans les codes des droits de la personne. » Ce Bureau des droits de la personne reprend la propagande véhiculée par la page « La journée de solidarité avec le hidjab à Ottawa : Luttons contre l’islamophobie » de la CAWI :
La journée du hijab (sic) vise à favoriser le respect religieux mondial et la compréhension dans les collectivités, de même qu’à promouvoir la solidarité avec les femmes musulmanes.
comme si le « respect religieux »—non pas la liberté de religion—était inscrit dans la Charte canadienne des droits et libertés. Bien que la « compréhension dans les collectivités » puisse être un but louable, cette phrase, pour être plus franche, devrait se lire « compréhension dans les collectivités religieuses » comme si la religion et les communautés qui en font la promotion étaient susceptibles d’être comprises : au fond, la religion est incompréhensible.
Tandis que plusieurs articles1 critiquaient la « Journée de solidarité avec le hidjab » deux lettres ont été adressées au maire d’Ottawa Jim Watson. Shabnam Assadollahi qui milite pour les droits de la personne a écrit à Watson pour l’aviser que le fait de permettre à un groupe privé de promouvoir une journée de solidarité avec le hidjab et de tenir un événement connexe à l’hôtel de ville pourrait entacher la réputation de la Ville en ayant l’apparence de favoriser une religion, voire faire du prosélytisme pour celle-ci, au détriment des autres religions. De plus, cela aura l’apparence de promouvoir le port (même par les non-musulmanes) d’un vêtement fort controversé tel que le hidjab, qui dans beaucoup de pays est l’apanage d’une idéologie extrémiste qui dévalorise les femmes et menace leurs droits humains.
Le Centre for Inquiry Canada (CFIC) a écrit au maire et au conseil de la Ville d’Ottawa afin de leur exprimer ses objections à ce que la Ville accueille une célébration du hidjab et pour aviser le maire que, en commémorant le hidjab, la Ville d’Ottawa affiche une préférence pour un point de vue religieux au désavantage des autres et accorde un privilège à une religion au détriment des droits humains.
Apparemment Assadollahi et CFIC ont dirigé leurs plaintes vers la mauvaise cible. Un porte-parole du maire Watson a expliqué que l’hôtel de ville possède plusieurs espaces disponibles en location au public en général à condition que l’événement y tenu se conforme aux règlements pertinents.
Les règlements régissant l’« Utilisation des espaces publics à l’hôtel de ville d’Ottawa » indiquent qu’« il est possible d’y louer des salles et des espaces pour une utilisation publique. » Il y a des frais de location pour les locaux et les espaces qui peuvent être réservés « en semaine après les heures normales d’ouverture de l’hôtel de ville uniquement (17 h). » Donc il semble que le seul traitement de faveur accordé par l’Hôtel de Ville d’Ottawa à l’organisation CAWI a été de permettre que cet événement hidjab débute à 16 h au lieu de 17 h.
Assadollahi et CFIC auraient dû adresser leurs objections à l’organisation CAWI, non pas au maire. L’événement « Journée de solidarité avec le hidjab » organisé par l’initiative « Une ville pour toutes les femmes » était gravement malavisé. Exprimer une solidarité avec le port du hidjab n’est aucunement une bonne façon d’ouvrir la ville d’Ottawa à toutes les femmes. C’est l’organisation CAWI qui risque d’avoir terni la réputation de la ville d’Ottawa en affichant une préférence pour un point de vue religieux au désavantage des autres et en accordant un privilège à une religion au détriment des droits humains.
- Par exemple :
Why is Ottawa honouring the hijab? (Pourquoi Ottawa rend hommage au hidjab ?) et
The Folly of Ottawa’s ‘Hijab Day’ (La folie de la journée hidjab à Ottawa) et
What Is Canada Doing Celebrating Hijab Day? (Comment se fait-il que le Canada célèbre une journée hidjab ?)
Je n’aime pas l’angle sous lequel on critique une action religieuse par le fait qu’elle désavantage une autre.